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Formes élémentaires de la vie religieuse - Emile Durkheim

3 octobre 2012

Ambiguités Durkheimiennes

Totémisme Moderne (suite)

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Dans la logique épistémologique soulevée par Durkheim, où il ne poussa pas sa démonstration jusqu'au bout, demeure toujours cette ambiguïté entre religion "officielle" et religion "séculières" (ou laïques), qui ne seraient pas du même ordre.

Enfonçons donc le clou : Si un tel cas de figure échut (séparation conceptuelle), la phénoménologie étant identique par ailleurs, le sociologue  devrait se livrer à une gymnastique intellectuelle des plus ridicules :

Pour comprendre un phénomène social séculier, il devrait d'abord imaginer ce que serait ce phénomène social s'il était apparenté au religieux, et l'étudier comme tel la phénoménologie étant identique. Une fois cet étude bouclée, il refermerait la porte en disant : "Mais bien sûr, malgré ces similitudes phénoménologiques, les deux domaines restent bien distincts."

Un peu comme si un astrologue voulait envoyer un satellite sur une lune de Jupiter, employant en cela des calculs basés sur un système tournant autour du soleil, et une fois la trajectoire établie finirait par dire "Mais bien sûr, cela ne doit pas nous faire oublier que le soleil tourne autour de la terre".

De l'autre coté les religions "officielles" voudraient bien pouvoir se démarquer de la vulgate dans ce contexte. La seule chose qu'elles pourraient prétendre, c'est éventuellement qu'en tant que communautés, il soit normal qu'elles aient emprunté les modes sociologiques idoines pour se former et se perpétuer, comme les autres communautés. Et que donc leur spécificité réside ailleurs.

Mais cela voudrait dire à priori, que tout ce qu'elles ont de commun avec les autres communautés ne fait pas spécificité pour elles. Exit donc les ritualisations des cultes, ses totems et représentations, l'âme du groupe, leurs concepts cosmologiques et philosophiques même... Que resterait-il donc ? En fait, la cosmologie et philosophie athées sont bien du même ordre que celles des religions, elles ne font que précéder ces dernières dans l'actualisation des dernières découvertes dans leur "théologie".

Totemisation sociale : magique ou pas ?

Deux interrogations agitent la sociologie :

     1/  Mutations religieuses

La religion ne disparaîtrait pas mais changerait de nature, elles se feraient plus laïque. Il y aurait ainsi un transfert vers la sphère politique et culturelle, de Dieu vers Marx ou De Gaulle, Elvis Presley ou Diego Maradona.

D'abord ce n'est pas un changement, les épisodes du veau d'or, des "marchands du temple", du refus de sacraliser les saints par les protestants, montrent bien qu'il y a toujours eut des cultes parallèles aux cultes officiels. Les cultes agraires ont toujours survécu même s'il jouaient profil bas  religieusement devant le culte officiel. Idem pour les croyances occultes, astrologiques, etc.. Enfin les monarques ont toujours fait l'objet d'une certaine dévotion, bien que leur prérogatives restent à priori purement terrestres. On pourrait ainsi multiplier les exemples à l'infini.

Mais finalement l'humain a toujours été polycultuel, et l'instauration de cultes en culte d'état ne fit que camoufler temporairement cet état de fait. La sécularisation des sociétés découplant culte officiel de la vie publique remet simplement les choses en perspective.

Il n'y a pas tant transfert d'un culte vers le social, mais simplement remise en place d'un ordre "naturel" auparavant masqué.

Ceci dit il y a bien transfert de cultes vers d'autres, mais cela a toujours existé : Nous ne sommes pas resté éternellement attaché aux cultes assyriens. Même les cultes officiels évoluent : les dieux égyptiens n'ont pas toujours eu la même importance dans leur panthéon, les chrétiens, musulmans, etc., voient leurs théologies diverger d'un groupe à l'autre.

Alors que dire des bouleversements actuels :

Bien que de l'ordre du "normal", elles subissent deux accélérations.

D'abord le sacré n'étant que l'expression du social, ses mutations suivent logiquement le rythme des bouleversements sociétaux auxquels il est étroitement associé de par sa nature.

Ensuite, il y a l'accélération des moyens médiatiques : Une des révolutions majeure religieuse advint après l'invention de l'imprimerie donnant accès aux savoirs religieux au plus grand nombre. Avant les croyants ne pouvaient se faire une idée par eux même des textes parce qu'ils n'y avait pas accès. On notera un mouvement identique chez les arabes qui sont de plus en plus alphabétisés, et donc se font de plus en plus une idée par eux même des textes.

La révolution médiatique actuelle c'est internet. Désormais on ne digère plus les informations que nous servent les média classiques, mais on va les compléter par des recherches exogènes sur internet, avec toutes les dérives afférentes, soit, mais aussi bien d'autres ressources informatives.

Ce ressourcement informatif diversifié transforme les modèles de pensées du social plus rapidement, donc du Sacré.

     2/  Sacré or not sacré ?

Sacré : Le mot tabou est lâché.

La seconde interrogation, venu des athées qui peinent à se reconnaître comme religion, serait de dénier au sacré sa nature nécessairement "magique". Le transfert de sacré ne serait pas nécessairement synonyme de transfert de merveilleux irrationnel.

Les athées verraient bien que l'émergence de la raison en tant que Totem social absolu soit dépourvu d'irrationnel, et militent pour une "normalisation" rationaliste possible du sacré.

Ach ! "P'têt ben qu'Oui, p'têt et non : Faut voir ?" dit le Monstre en Spaghetti Volant (le monstre serait d'origine normande en fait).

Le précédent communiste nous incite à la prudence. C'était tout de même une idéologie basée sur un rationalisme social, et l'on a bien vu toutes les dérives cultuelles qui en sont issues. Les Athées répondent que le communisme n'était pas un rationalisme, et même si cela était les dérives du mouvement étaient exogènes, et non tant donc au noyau "théologique" du mouvement.

Alors soyons clairs, les dérives du communisme sont inhérentes à sa sacralisation totémique. Et si l'on veut consacrer la raison, les mêmes dérives sont à priori inévitables.

D'abord parce que définir la "raison" ne fait pas consensus, loin s'en faut. Et déjà s'il se fait des schismes au sein de l'église de la raison, on voit déjà bien en quoi cela est déraisonnable en soit. Prenons la science, certes il y a consensus dans un certain nombre de domaines, mais ses avancées aux confins des connaissances sont loin de se faire dans une sérénité "protocolaire" : Il y a du passionnel assez irrationnel là dedans, où les tenants des théories majoritaires égorgeraient volontiers tout vif tout nouveau concept iconoclaste sur l'autel d'un prétendu sérieux scientifique.

En d'autres termes, il ne peut y avoir de raison dans la définition de la raison.

La seule chance d'aborder la question de la place du rationnel dans le social à peu près sereinement est d'accepter que le domaine est miné par l'irrationnel sacral.

Cet irrationnel est de l'ordre du "magique" exactement comme dans les religions "officielles", où le dérapage contrôlé est de mise pour ne pas finir dans le ravin.

En définitive, toute totémisation de la raison doit savoir qu'elle embarque dans un véhicule consacré. La raison se doit donc d'apprendre quels sont les caractéristiques de ce véhicule, ses capacités de réactions, et surtout ses défauts intrinsèques pour espérer rester dans la course. Car finalement les courants religieux concurents (compris sécculiers) sont très pragmatiques dans la maitrise de cet outil et s'y adaptent plus qu'il ne le domptent finalement. Ils ont donc une longueur d'avance.

Et la raison doit admettre le caractère mystique de tout idéologie sociale pour espérer s'y faire une place centrale et surtout la garder.

Mais en quoi consisterait un investissement mystique de la raison ?

Paradoxal mon cher Watson ! Mais indispensable donc.

Les caractéristiques de toute sacralisation sont finalement assez bien connues ?

S'agit-il donc pour les rationalistes de donner à leur mouvement une forme prémâchée et qualibrée afin d'être adoubée par la société comme modèle totémique dominant ?

D'abord on voit bien que la raison n'a pas eu besoin de cela pour avoir sa place centrale dans l'idéologie moderne. Les choses ne se passent pas ainsi dans le véhicule "sacral", ou le culte est plus la résultante d'un corpus social insaisissable, que l'imposition coercitive d'un modèle rigide à ce corpus qui lui échappe malgré tout.

La première chose que la raison doit admettre, c'est qu'elle est bien embarquée dans ce véhicule qu'elle le veuille ou non. Alors autant assumer d'y être, et admettre les limites de l'exercice.

Le modèle pastafarien est assez intéressant (sérieux là), le pastafarisme est une religion au sens sociologique du terme, mais donne aussi dans la satyre et surtout l'auto-satyre religieuse. Elle a trois totems principaux : La raison d'un coté, l'humour de l'autre, et finalement un sous totem essentiel qu'est l'autodérision. Le pastafarisme est donc une religion, mais une religion qui se veut décalée, se sachant pertinemment mue par des mécanismes sacrés "sine qua non" ; Religion qui décide de l'assumer tout en les prenant au second degré (voir plus)... prenant ainsi distance avec ce qui la meut tout en étant mu par elle, c'est clair ?

Donc la raison se devrait de se laisser porter par son véhicule totémique, mais en même temps prendre un recul analytique de son insertion sociale en tant que telle (et incontournable à priori) : Analyser sociologiquement les mouvements qui l'agitent, essayer de rattraper ainsi les dérapages incontrôlés inoportuns, et assumer les à cotés consacrés de son culte en les resituant dans leur contexte de "ciment" social métaphorique, non rationnels mais nécessaires tant que pas trop délirants.

Ce recul analytique ne pourrait se faire que dans un certain style. A savoir : "Soit nous avons repéré un certain nombre de ritualisations irrationnelles dans la mise en place de la pensée rationnelle dans le social, et en voici la teneur..." ... "Si ce n'est très rationnel, c'est plus jouissif ainsi, car il faut bien que cette pensée apportent son lot de satisfaction pour être empruntée" ... "La satisfaction ultime est celle de son efficence concrête à terme, mais cette satisfaction n'étant évidente au premier abord, nous souscrivons à la nécessité de paliers plus ludiques, et sociaux, que rationnels pour y parvenir"

Notons que cette démarche admet un aspect métaphorique des paliers intermédiaires : Il ne sont que la symbolique ludique du but ultime.

Nous ne passerons pas en revue tous les mécanismes totémiques que la raison auraient à assumer socialement... Mais dont elle devrait prendre un recul amusé, dans le sens où ces procédés plus ou moins absurdes seraient néanmoins incontournables dans leur nécessité sociologique.

La question centrale reste d'espérer jouer des mécanismes sociologiques, plutôt que d'en être le jouet inconscient. Et la première étape reste de la prise de conscience des mécanismes invisibles, de la dynamique qui nous portent, pour espérer influer dessus.

Le Rationalisme est-il prêt à assumer pleinement son rôle ?

Jusqu'à présent les rationalistes joue la carte de la rationalité intellectuelle. Pour eux la raison est la raison et n'a que faire d'une mise en forme sacrale en totem social pour faire valoir ses valeurs intrinsèque. A la limite lorsqu'une consécration advient, ils feignent de s'en amuser en relativant le fait comme superstition marginalement amusante.

Prenons le culte d'Einstein.

Le bonhomme disait de lui à son voisin, alors qu'un orateur l'enscensait à un colloque : "Si seulement il savait que le type dont il parle ne porte pas de chaussette actuellement".

Alors c'est un peu l'attitude de la science face à sa sacralisation, ce qui participe d'ailleurs paradoxalement d'autant à la-dite consécration. Mais en même temps Einstein et les autres recherchent la notoriété la plus large possible à leurs théories, notoriété qui n'est que de l'ordre de la totémisation : c'est quoi un prix nobel ? On aura beau dire que ce n'est que respect pour la pertinence rationnelle, on voit bien que ça va bien au delà.

Rien que sur Einstein, ça va. Mais citez moi donc l'auteur de la théorie des cordes : Rien, évidemment c'est une théorie faites de "bout de ficelles", car elle a bien une dizaine et plus d'inventeurs. Ce qui veut dire qu'ils ne sont consacrés, tout en n'empêchant pas leur théorie d'être sanctifiée par son coté plus ésotérique que compréhensible par exemple.

La raison et la science restent dans cette ambiguïté qui est sensée se réguler d'elle-même rationnellement, tout en sachant quand même pertinemment que cette régulation tient bien plus de l'irrationnel collectif que d'une quelconque raison imaginée ici.

Pourtant le rationnel aurait bien besoin de plus de pertinence en la matière. La science est ainsi constamment attaquée dans sa nécessité sociale (Cf. Dessein Intelligent et autres)... certains religieux et politiques verrait bien la raison définitivement reléguée aux strapontins, en gardant encore l'irrationnel collectif et des marchés comme moteurs sociaux.

Alors reste la question de la structure et de la dynamique d'une telle approche. Il est évident que les scientifiques ont autre chose à faire que de gérer l'image de la science et de la raison dans l'opinion. Par contre, il y a un certain nombre d'athées et de rationalistes croyants ou agnostiques qui peuvent en faire la promotion en réfléchissant sur ses symboles et leur lisibilité dans l'opinion. Par ailleurs, s'il reste un domaine scientifique dont c'est à priori l'objet : La sociologie. 

Donc la "science" (molle) sociologique pourrait s'attacher à cette tâche également, reformuler les totems de la raison dans leur articulations et représentations : les formuler c'est les reformuler à terme, dans la mesure où cette formulation, forcément empreinte d'une certaine subjectivité (on est en sciences sociales), ne peut qu'avoir un impact sur la conscience collective dans les rapports entre rationnel et irrationnel dans le rationnel (ça suit derrière ?).

 

Le Modèle Politique :

Le monde politique est un grand consommateur de "communiquants". 

Le terme est ambigu, en fait ce sont avant tout des sociologues qui essayent de mettre en phase l'imagerie politique avec les mouvements d'opinions des électeurs. Voir pour les plus présomptueux, ils essayent de façonner l'opinion dans leur intérêt, ou tout le moins l'infléchir.

Alors tous les politiques ne savent pas que leur rôle social est marqué par le sacré totémique, certains si manifestement. Mais une chose est sûre : leur "communiquants" le savent très bien.

Ils savent que l'élu (tout un programme déjà !), est la représentation du style de société dans lequel le social se reconnaît ; Soit par définition un quasi Totem consacré.

Donc la représentation politique est constamment gérée par un staff de sociologues analysant en permanence les mouvements d'investissement des valeurs porteuses dans la société. Car l'essentiel c'est de gagner, il est toujours temps après de faire de la pédagogie sur la différence entre désirs et possibles.

Il y a encore ceux qui se considèrent au dessus de la mêlée : C'est à dire que sachant tout ceci parfaitement, ils pensent avoir saisi et incarner l'essentiel des valeurs fondamentales nécessaires à la pérennisation d'un social stable, au delà des soubresauts de l'intantanéïté des choses.

Alors contrairement à la raison et rationalité scientifique, le politique est rentré de plein pied dans l'universalisme sacral, et il assume plus ou moins sa place en tant que telle. En ce sens c'est un modèle : Un modèle à dépasser pour les rationnalistes, mais un modèle quand même de gestion interne et externe de ce qui meut les choses socialement. On supposera que les sociologues possèdent mieux la maîtrise des outils idoines, et sont plus à même de les affiner.

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12 septembre 2012

La vision politico-religieuse de Durkheim

Si on veut comprendre l'idéologie socialiste réformatrice, on ne peut que se référer à Durkheim.

Durkheim n'est pas un révolutionnaire. Pour lui toute "table rase" du passé ne peut amener qu'à une acculturation forcée du social, qui ne peut qu'amener à un délitement social, voir une implosion amenant à tous les excès telle qu'en la révolution française.

Afin d'éviter une telle implosion, il faut nécessairement opérer une lente mutation des anciennes idéologies vers de nouvelles à partir de ces dernières.

 Pour Durkheim, la société sacralisée est la base de toute fondation sociale, et la religion a été par le passé le ciment social, en tant qu'athée il envisage une laïcsation progressive du social. La chute des valeurs morales religieuses doivent être remplacées par des valeurs morales laïques mais non moins sacrées. Le politique doit prendre le relais du religieux, mais en quelque sorte en en empruntant sa phénoménologie, en se calquant sur elle.

 Ce n'est pas pour lui un calcul machiavélique, mais une nécessité intrinsèque. Toute communauté sociale étant fondée sur la formation d'un totem, le social ne peut tenir que dans une forme totémique. Il faut donc remplacer les anciens totems religieux par de nouveaux plus laïcs, mais empruntant nécessairement cette forme de sacralisation totémique pour assurer la pérennité sociale.

 Mais un totem ne se décrête pas, il ne peut que s'incarner par l'esprit de ses ouailles. La sécularisation des esprits ne peut donc s'imposer, les gens n'ayant acquis leur identité que par identification à leurs totems d'origine, on ne peut en faire table rase sans risque de perte d'identité déstructurante.

 Si on impose une nouvelle âme collective aux gens par de nouveaux totems, il risque d'y avoir conflit interne entre le modèle imposé et leur construction identitaire initiale, et leur amener ainsi à une perte d'incarnation déstructurante.

 Ces déstructurations personnelles, qui peineraient à se reconnaître dans les totems imposés, ne peuvent qu'engendrer une déstructuration sociétale par un investissement fragilisé ainsi du totem.

 Aussi la vision de Durkheim sur le politique rompt-elle avec l'idéologie marxiste révolutionnaire : L'idée de changement doit tenir compte des racines identitaires des intéressés pour les faire évoluer pas à pas vers une mutation identitaire qui intègre petit à petit les nouveaux totems aux anciens et s'y substituent en douceur.

 Mais Durkheim reste assez marxiste dans l'idée : Le social se doit d'évoluer vers une juste répartition du fruit du labeur de chacun, en éradiquant la spoliation des uns au profit des autres, en mettant la raison la science, la tolérance et l'equité au centre de la morale laïque en tant que totems fédérateurs... En fait, il se montre plus rationaliste, humaniste que marxiste : C'est un scientifique dans l'âme après tout...

 Mais il envisage donc plus les choses dans un lent processus de maturation sociale, que dans un bouleversement radical et abrupt.

 En fait on peut dire qu'il avait pressenti l'impasse du communisme révolutionnaire par les excès qui ne pouvaient qu'advenir par déstructurations paranoïde de l'identité des individus, et donc du collectif. Aussi les dérives d'autres mouvements nationalistes totalitaires : Le nationalisme étant une forme de religion clanique substitutive aux anciennes religions.

 Néanmoins Durkheim envisageait le patriotisme comme indispensable à l'équilibre d'une communauté de citoyens comme ciment social. Mais un patriotisme basé sur la citoyenneté démocratique expurgée de nationalisme : En somme les nations se devaient d'être soeurs dans un concert de nations apaisées (et évidemment démocratiques), dans une solidarité mutuelle expurgée donc de visées expansionnistes dominatrices. Bref, ça en fait le penseur du socialisme réformateur à l'européenne, encore que les tentations libérales de la sociale démocratie le place plus à gauche de celle ci dans le but final.

 Durkheim avait donc raison, non seulement dans sa prudente vision des changements à l'emporte pièce tels que le communisme et le nationalisme, mais aussi dans les progrès ultérieurs que seront l'ONU et la Communauté Européenne, mais encore une fois dans l'idée d'une lente maturation des mentalités.




 Mais on pourra objecter que Durkheim n'avait pas tiré toutes les conclusions de ses études sur le sacré comme ferment social. Notamment en ce qui concerne les cultes négatifs.

 Nous entendrons par là que les totems se définissent autant par leur apport bénéfique à la vitalité de la communauté (saison des pluies et revitalisation de la nature, c'est à dire du lien social), que par rapport à l'angoisse de dessèchement et d'annihilation de la communauté (saison sèche, traversée du désert, déluge, ascétisme donc, carême, ramadan, etc.).

 Où l'on voit bien que les progrès tels que l'ONU, et la Communauté Européenne doivent plus au "déluge" de la seconde guerre mondiale qu'à un vif désir de communion rationaliste, tolérante et équitable entre les nations.

Digression (comme c'est bien dit : gression)

 En fait, il est assez darwiniste dans l'esprit. Darwin imaginait l'évolution comme un lent processus de transformation par de petites mutations bénéfiques au fil du temps les privilégiant à terme, mais il n'avait pas alors connaissance de l'influence non négligeable des cataclysmes dans la sélection naturelle, tels qu'astéroïdes, glaciations, aridifications, bouleversements géologiques et autres données écologiques. Aussi l'évolution fulgurante d'une espèce (l'humain par exemple, mais il y en eut d'autres) peut inter-agir très rapidement sur l'évolution globale (à l'échelle géologique et évolutive). Bref la sélection naturelle fonctionne aussi par bonds successifs à partir de "crises" cataclysmiques, mais toujours par sélection naturelle bien moins linéaire néanmoins que prévue.

 Soyons clairs, si le réchauffement climatique s'avère aussi cataclysmique que redouté, l'évolution de l'âme humaine sera plus rudement mise à l'épreuve que les religions n'ont pu l'être par l'avènement de la science et ses soubresauts que furent les révolutions françaises, bolchéviques et nationalistes.

 Alors la théologie révolutionnaire plutôt que réformiste pourquoi pas ? Mais n'oublions pas tout de même ce qu'il en coûte d'un cataclysme, cela ne vaut-il mieux pas attendre un peu, voir si les choses n'évolue pas par elles mêmes ? Sauf donc que l'humain est un animal qui a plus de mémoire qu'un éléphant, et il a tendance à réinventer son futur en évitant les crises du passé (on ne rigole pas derrière mon dos quand j'écris, merci !). Mieux, il commence à faire sienne la mémoire de la nature : il sait désormais que cette dernière peut avoir des soubresauts dévastateurs dont il n'avait aucun souvenir. Bref, il travaille à éviter les crises : Alors vas pour le réformisme, sans perdre de vue l'éventualité de déluges toujours en embuscades.

 Mais donc l'humain aurait besoin dans la formalisation de ses cultes, fussent-ils laïques, de cultes acétiques, donc de traversées du désert. Ce qui pose un sérieux problème à l'idée réformiste de Durkheim.

 En effet, celà voudrait dire que son projet ne peut se passer d'alternances politiques formant carême, et que donc le modèle rival libéral-nationaliste est appelé à défaire régulièrement ses avancées, et que son projet serait condamné à faire du sur place dans l'aternance ? Essayons d'être positif quand même, les choses ne sont pas systématiquement détricotées à chaque alternance (Cf. abolition de la peine de mort), et même l'autre bord abonde parfois dans son sens (Cf.: avortement). Mais cela marche aussi dans l'autre sens, le socialisme abonde de plus en plus dans le pragmatisme libéral. Aussi, si la pensée durkheimienne est à la base du socialisme, elle influe aussi sur la droite républicaine qui voit dans son projet une possibilité de gérer rationnellement les transitions sociales dues aux bouleversements brutaux économiques et industriels... Car in fine le libéralisme vise à une régulation rationnelle du social aussi, et n'a que faire des anciennes religions même si pragmatiquement il leur fait des appels du pied.

 Aussi, la vision réformiste de Durkheim ne se mesure pas sur le moyen terme, mais sur le très long terme : La perte de la prégnance religieuse face à la monté de la science depuis Galilée se mesure en siècles, et le monde est loin d'être ne serait-ce que démocratiquement acquis, malgré de lents progrès.

 Comme on dit : "3 pas en avant, 2 pas en arrière, 2 pas su'l'coté 2 pas d'l'aut'coté", l'avancée ne semble pouvoir se faire qu'ainsi et il faut s'attendre encore à de maints reculs sporadiques. Et comme dit Freud à propos des progrès de l'âme humaine, il y a souvent renforcement du symptôme avant sa disparition...

Aléa pasta est.


  Par ailleurs, on s'étonnera aussi de son rationalisme financier : "Juste répartition des richesses" : Ce n'est pas un libéral qui envisage l'appât des bénéfices comme facteur de progrès social, mais voit plutôt une société gérée par les désirs démocratiquement exprimés des collectifs repris par une administration s'efforçant d'y répondre en stimulant les technologies dans le sens souhaité. Les libéraux répondront que les gens votent avec leurs achats, ce à quoi les rationalistes répondront que la consommation est sur-promue publicitairement comme moyen d'accès à un bonheur artificiel assez illusoire, voir dangereux pour l'équilibre écologique de la planète.

 Mais le débat étonnant n'est pas ici. Il l'est plutôt dans le sens où l'économie est une sorte de "marqueur" du Sacré. Un stylo "Bic" n'est qu'un outil de communication, et ne coûte que ce qu'il en coûte de le produire : C'est manifestement un objet profane (en fait pas tout à fait, mais grosso modo quand même), Par contre un "Mont-Blanc" est un stylo de luxe qui est sensé "encensé" son propriétaire : le distinguer par cette marque comme faisant partie du clan des "élus" appelés à réussir (à entrer au paradis terrestre ?). 

 L'argent est un agent qui sert souvent plus à identifier la "valeur" symblolique des objets en terme de sacralisation sociale, que le coût de leur production et commercialisation... Et justement la vision rationaliste de Durkheim sur la juste rémunération fait l'impasse sur cet aspect distinctif entre le profane et le sacré. Or cette distinction est absolument nécessaire dans toute formalisation et équilibre d'un collectif d'après lui. Il y a là une contradiction qu'il faudra bien se résoudre à aborder rationellement, tant que faire se peut en ce domaine.




 Pour ma part, j'opterais plutôt pour un étiquetage différencié des prix.

 Mais ce n'est pas si simple, il est d'abord difficile d'étiqueter tout produit courant et à priori profane. Il s'agirait donc déjà que cet étiquetage différencié concerne les objets d'un certain prix.

 Quoi que, s'il s'agit d'y mettre certaines valeurs, tels que le commerce équitable, le respect écologique, etc. des objets en provenance de pays "à dumping social" pourraient se voir appliquer cet étiquetage.

 Il s'agirait en fait de démarquer la valeur strictement financière des objets de leurs coûts réels. Et quand on parle de coûts réels, on l'envisagera sous un angle "Sacré", c'est à dire en terme des valeurs que l'on estime importantes de respecter dans les échanges humains formant communauté.

 Il s'agit en sorte de marquer l'éthique de production du produit avec des indicateurs : Cela a d'ailleurs déjà commencé, par l'apparition de logos et label de qualité "économie responsable" "bio" ou "commerce équitable". Mais cela relève encore d'initiatives privées pas toujours fiables. Ceci gagnerait à être standardisé et généralisé.

Mais que pourrait-on marquer ? Eh bien tout ce qui a une valeur de respect social et environnemental (mais c'est aussi du social à terme). Donc indiquer, pour chaque produit, des pourcentages (ou catégories A B C...) correspondants :

  1. Au salaire de base de la majorité inférieure des salariés de sa production, par rapport au salaire moyen de la majorité inférieure des 10% de salariés équivalents les mieux payés de part le monde.
  2. Accompagné par un marqueur des conditions de travail (A B C ...)
  3. Un marqueur des conditions écologiques de sa production, idem...
  4. Le pourcentage du coût du transport et de sa commercialisation.
  5. Et la marge bénéficiaire globale dégagée avant réinvestissement, et après.

Un dernier marqueur - mais ça ferait peut-être trop ? - pourrait signifier le sérieux et transparence du pack d'actionaires et montage financier présidant à sa production.

 Bref, les prix seraient toujours libres et pourraient toujours servir de référenciel sacré. Mais chacun saurait au moins précisément ce qu'il en coûte de chaque production... Car le prix global ne dit en général pas grand chose sur leur coût réel en terme de valeurs respectées, ou bafouées.

 Il est évident qu'à prix égal, un produit de luxe, produit par des "petites mains" chèrement payées -personnel de qualité donc - dans de bonnes conditions de production, aura meilleur accueil qu'un produit idem payé au lance pierre dans des conditions déplorables (avec une trop grosse marge bénéficiaire de surcroît : ça sent plus l'escroquerie à la petite semaine que le luxe ainsi).

 Les marges bénéficiaires exorbitantes, répondant à la valeur symbolique de l'objet, passeraient d'autant mieux que l'objet répondrait à des valeurs intrinsèques respectueuses de valeurs suprêmes universellement sacrées.

 Et ce qui est valable pour le luxe vaut aussi pour les produits communs, très souvent aussi sacralisés à la mode du luxe.

Mais au moins ainsi cohabiterait le juste prix à payer, tout en permettant néanmoins de marquer, en le surtaxant, un objet pour sa valeur sacrée - mais en toute connaissance de cause.

 

10 septembre 2012

Mythologie religieuse ou idéologie ?


Le Totémisme moderne (suite)

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 Pour cimenter toute communauté, il faut donc un totem. Mais un totem ne s'investit que par ses qualités quasi magiques de ciment social précisément.

Cette "magie" s'illustre dans la mythologie attachée au totem.

 Prenons le clan du kangourou (j'aime bien ce clan plein de ressorts), son idéologie veut que chaque membre du clan soit habité par l'âme du grand ancêtre mi-humain mi-kangourou. Alors là, c'est idiot à priori : Toute mythologie a un arrière plan métaphorique sans lequel elle ne tient pas.

 La valeur essentielle de cette mythologie réside dans l'idée que chacun participe d'une âme commune, et que l'anéantissement de cette âme commune signerait l'anéantissement de la communauté. Point.

Bref, il est impératif que chacun participe aux rituels de revitalisation de cette âme commune.

C'est la croyance primordiale de toute communauté constituée.

 On notera que la valeur accordée à l'âme en question n'a aucune espèce d'importance : Une âme de kangourou ?!?  Le clan voisin a d'ailleurs une âme de perroquet, et l'autre une âme de serpent... Débile !

 L'âme n'a qu'une qualité en elle même, c'est d'être commune : Peu importe qu'elle soit de kangourou, perroquet ou serpent, mais on pourrait dire aussi juive, chrétienne, musulmane, française, allemande, communiste, ou démocrate.

 Là on s'insurgerait volontiers, être chrétien, musulman, athée, démocrate ou communiste, ce n'est pas pareil. Oui, comme dire qu'être kangourou ou perroquet ce soit pareil provoquerait des réactions indignées dans les deux communautés. Les valeurs intrinsèques de chaque communauté sont sacrées et ne peuvent absolument pas être remises en cause en étant assimilées à celles de leurs voisines : " Ah ! C'est quand même autre chose quand même ! ".

Ah ! Là, je sens que ça coince.

 Bon je concède que la rationalisation des croyances dans les cultes modernes a fini tout de même par dégager des valeurs philosophiques réelles et différenciées au sein de ces différents cultes.

Néanmoins, ceci continue de se passer à deux niveaux distincts :

  • Le premier est que de toute façon l'âme d'un collectif se doit d'être rédhibitoirement insoluble dans celle de sa voisine, et peu importe alors la teneur de cette âme (kangourou, perroquet, chrétienne, ou communiste :. On notera que juifs et chrétiens sont sensé honorer le même dieu, et avoir quelques valeurs communes, mais chacun des groupes est d'accord pour dire qu'il est fondamentalement différent de l'autre et qu'on ne peut les confondre.)
  • Le second réside dans ce que la rationalisation philosophique de ces différences a fini par produire du sens à la limite de la pertinence. A la limite, parce que ces philosophies restent plus prétextes à différentiation que réalités intrinsèques. Ainsi où sont "l'amour du prochain" et "tendre l'autre joue" dans l'inquisition, les croisades chrétiennes ou chez les conquistadores esclavagistes ? Où est "le paradis prolétarien" dans le communisme ? "Le pouvoir des électeurs" qui se dilue dans le pouvoir de la finance dans les démocraties ? 

 La fonction essentielle de l'âme est de former une communauté, et ses prétextes philosophiques volent en éclats devant la nécessite de la communauté à rester unie face aux menaces supposées. Ici les théologies iconoclastes risquait de faire éclater la chrétienté ; Là, l'Islam empèchait les chrétiens d'aller faire leurs rituels de revitalisation de la foi à Jérusalem (pèlerinage sacré) ; Là encore, le doute sur l'adhésion des masses à l'idéal communiste lui fait assujettir les masses plutôt que de les libérer ; Enfin la démocratie ne tient que par l'intérêt individuel à sa sécurité matérielle, subordonnée à la bonne santé économique, et se vend donc à ses spécialistes présupposés ; etc...

 Bref, les prétextes philosophiques ne tiennent jamais dès lors que le spectre du délitement communautaire apparaît à l'horizon. Ceci dit, personnellement, je tends à renvoyer chacune de ces philosophies transcendantales (sociologiquement) à leurs cotés humanistes... Parce que fondamentalement, mieux vaut les tirer du "bon coté" en agissant sur leurs propres ressorts internes que sont leurs valeurs de respect de l'humain en chacune d'elle, tout en sachant très bien ce qu'il en est des valeurs prétextes et de leur trahisons potentielles ; Car ces "religions" se doivent de sauver au moins les apparences quand au respect supposé de leurs croyances en interne.

 Nous en revenons donc aux cotés illusoires et métaphoriques des mythologies attachées à l'édification des totems, idéologique dira-t-on pour les cultes modernes.

L'important est dans la métaphore, le symbolique.

 Reprenons le rituel de célébration du retour de la saison des pluies. "Rationnellement" les aborigènes disent initier le renouveau de la nature, par des danses de la pluie par exemple, qui va permettre à leur totem (animalier ou céréalier généralement) de reprospèrer et de se reproduire, de se revitaliser en somme. En fait ils n'initient évidemment rien du tout de ce coté : ça se fait tout seul. Par contre ils initient bien le renouveau communautaire, à travers sa revitalisation par ces rituels de revitalisation de la nature. En somme le totem, non tant comme animal ou céréale mais comme symbole du ciment communautaire, se trouve bien revitalisé.

 Bref, l'animal ou la céréale totem ne doivent pas être pris au premier degré, mais en tant que pure métaphore du ciment communautaire en lui même.

Mais dirions nous, il en est de même pour toute idéologisme formant totem pour une communauté moderne. Derrière les apparentes raisons de leurs rituels censés célébrer leurs valeurs, il faut décrypter ce qui est de la raison première et profonde de leur nécessité : La cohésion sociale à travers la métaphore de ses totems.

Par exemple, je suis pastafarien : J'adhère totalement à un totem qui est le dieu Monstre en Spaghetti Volant. Mais en même temps je ne crois pas un seul instant à la réalité matérielle de sa présence, me concentrant sur sa pure valeur symbolique. Il n'est que pure métaphore totémique d'une communauté qui se méfie de tout dogme préétabli et gravé dans le marbre. En même temps il a un but et une idéologie, "Combattre folies et absurdités religieuses", mais aussi bien cette idéologie se dissout en elle même : "combattre folies et absurdités religieuses" ne mène-t-il pas tout droit à des croisades fanatiques qu'il dénonce au départ ?

Aussi, le prétexte philosophique à former totem se mord la queue, et se dissout de lui-même ne laissant place qu'à la pure métaphore totémique facétieuse formant néanmoins communauté.

Je suis toujours aussi émerveillé devant la pureté inaltérable de ce totem absolu. J'en fais trop ? Un peu que j'en fais trop et heureusement. Trop peu, et ça pourrait rentrer dans un concept philosophique prétexte à totémisation pure et dure, niant son métaphorisme. La métaphore n'est pleinement explicite que si elle est carrément outrancière. c'est d'ailleurs sans doute pour cela que les mythologies sont en général totalement absurdes.

Ce que je veux souligner ici, c'est que quel que soit la philosophie d'un sacré ciment communautaire, il ne faut jamais perdre de vue que sa fonction première est de faire ciment, pas de s'auto justifier comme étant valable intrinsèquement. Que même éventuellement cette philosophie se contredira facilement totalement pour garder cette fonction première. Il faut constamment garder cette idée à l'esprit, pour comprendre et anticiper les dérives.




 Bien ! Les croyances s'expriment donc dans les mythologies afférentes, et ces mythologies étaient primitivement théâtralisées dans les manifestations religieuses par leur mise en scène en piécettes, contes et récits fantasmagoriques, le tout accompagné de chants et de danses pour mieux marquer les esprits de leur caractère sacré. Ainsi l'art et la culture était initialement entièrement dévolus au sacré et exclus du profane. Durkheim disait qu'une partie avait fini par s'nvestir dans le profane dans la modernité, mais en fait il se trompe, car quand un artiste essaye de transmettre quoi que ce soit, c'est quelque chose de l'ordre de l'âme collective auquel il cherche à faire échos chez ses congénères. On est toujours bien dans le sacré, même si c'est du sacré d'apparence laïque.

Aussi Durkheim faisait-il remarquer que dans le système totémique, ce qui était sacré pour un clan était profane pour les autres et inversement, et que, en faisant la somme de tout ce qui était sacré pour un clan ou pour les autres, on arrivait à ce que toute chose existante soit finalement sacrée soit pour l'un soit pour l'autre, inversement tout était profane soit pour l'un soit pour l'autre.

Bref, tout ce qui touche à la culture et à l'art est de l'ordre du sacré totémique ; maintenant définir à quel totem précis ils souscrivent ici ou là n'est pas chose aisée. Certains célèbrent le Dieu "Amour" les autres le Dieu "Pouvoir" etc.. Mais aussi donc ce qui est sacré pour l'un ne ne l'est pas forcément pour le voisin.

En somme en matière de culture et de sacré, tout est sacré ou profane suivant le point de vue où l'on se situe, les totems dans lesquels on abondent (en ce sens la sociologie ne peut être neutre car elle est nécessairement sacrée à un certain niveau).

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9 septembre 2012

Les rites piaculaires (ascétisme)

Le totémisme moderne (suite)

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Piaculaire ? est-ce que j'ai une gueule de piaculaire ? Peuvent pas parler comme tout le monde ces sociologues... Ethymologiquement : "expiatoire"

Bon en gros, le collectif s'étiole sans les individus qui le composent, d'où l'intérêt de revitaliser l'appartenance au totem commun par des rituels réguliers. Mais aussi pour mieux relancer ce processus il faut symboliser la menace de l'étiolement communautaire par des frayeurs mythiques. Ainsi les cérémonies de la saison des pluies, renouveau de la nature, mais en fait renouveau symbolique du collectif, est précédé de l'attente angoissée de cette délivrance durant la saison sèche et aride. C'est à dire ce qui risque de se produire si le collectif n'arrive pas à se refonder (dessèchement du collectif).

Et si la saison sèche n'existe pas pour symboliser cet assèchement spirituel, aussi bien on l'invente à travers le carême ou le ramadan par exemples. C'est la traversée du désert avec le retour aux mythes païens impies, le déluge, etc.. Les films catastrophes sont ainsi la mythologie moderne scientifique. Une catastrophe s'y annonce. Un savant brillant, mais iconoclaste, connaît la solution, et se heurte aux institutions scientifiques établies. C'est sa traversée du désert, mais il se bat avec acharnement, et on finit in-extrèmis à l'écouter devant l'inefficacité des conceptions classiques. La terre est sauvée et tout le monde exulte de joie et tombe dans les bras l'un l'autre : La communauté scientifique déchirée se réunifie dans l'allégresse. Ouf !... C'est aussi l'histoire des sciences, où tout nouveau concept est d'abord rejeté et vilipendé avant d'emporter l'adhésion commune et générale.

C'est l'empire du mal, du malin et des forces obscures qui menacent la cohésion du groupe et sa pérennité in fine.

Pas besoin de vous faire un dessein sur les boucs émissaires : Les roumains n'ont jamais été une menace pour la cohésion nationale, par contre les tensions liées à la crise risquent de faire imploser la société : Il fallut donc un dérivatif pour exprimer l'agressivité liée à ces tensions sans exacerber les rivalités internes, et c'est à ça que servent les boucs émissaires étrangers à la communauté. (N.B. : en fait le débat sur l'identité nationale avait fait des dégâts chez les français musulmans désormais intégrés, et aussi électeurs, il fallait d'autres boucs émissaires non français et non électeurs pour apaiser les tensions ainsi exacerbées entre français de confessions différentes, et ça tombait bien les arabes n'aiment guère les Roms - faut pas croire, mais Sarko avait de bons sociologues à son service, enfin pas trop bons quand même, franchement ? Parce que la sociologie dénonce ces dérives, alors qu'eux s'en servent pour manipuler les masses, et ça se voit comme le nez au milieu de la figure).

Bien, là la place manque pour faire un tour exhaustif du piaculaire lié au mythe de la désintégration sociale dûe au manque de ferveur collective.

Alors en gros c'est quoi ? A chaque fois qu'on évoque un dysfonctionnement social pouvant provoquer son délitement, du pervers du coin au réchauffement climatique, on évoque la désintégration sociale en fait. Non que le pervers ou le réchauffement n'existent pas, mais par exemple nos enfants ont énormément plus de risques d'être victimes d'accident de la circulation que d'un pervers, mais la charge symbolique pour le collectif dans la transgression d'un tabou y est plus forte. Le message est avant tout "Attention à ne pas transgresser les tabous qui forment le ciment de notre communauté", "c'est abominablement condamnable : Et voyez donc ce qu'il advient alors" ce n'est pas tant l'enfant qui est bousillé, que la sérénité du collectif dans ses capacités à transmettre ses valeurs aux futures générations sans les compromettre. (Houlà, ça fume dans la cambuse, vite un seau d'eau pour refroidir tout ça moussaillon).

Chômage, perspectives économiques, écologiques, etc. qui ont leurs réalités intrinsèques, mais aussi une charge symbolique et métaphorique quand aux mythes fondateurs de la collectivité. La difficulté consiste à bien séparer les deux niveaux de lecture : Le fait réel et ses enjeux réels, et sa charge émotionnelle symbolique pour la cohésion sociale mythologiquement structurée.

Tout ce qui est de l'ordre du dysfonctionnement y renvoie : Dans un monde cohérent, où la cohésion sociale est sans faute s'entend, tout devrait tourner rond. Donc (!?) le moindre accroc est potentiellement symbole de dysfonctionnement religieux, d'où l'idée de cantonner le mal à des causes extérieures à la communauté qui lui échappent et atteignent les individus au cas par cas sans en affecter le tout. La personne atteinte par l'accroc maléfique est plus ou moins pestiférée, et ne peut rejoindre la communauté que par des rituels purificateurs individualisés : C'est alors l'affaire des confesseurs, exorcistes, mages, rebouteux, médecins, psy. (censés exorcisés eux même), d'extirper individuellement le mal en chacun, mal individuel donc épargnant le collectif. Ach ! Quid des licenciements collectifs... mais promis juré, chaque cas sera traité individuellement, ce ne sera plus un problème collectif menaçant la cohésion commune.

La justice ainsi traite les accros individuels au cas par cas : L'injustice n'est que la transgression des tabous à respecter individuellement. Il n'y a pas pour elle d'injustice systémique, qui découlerait d'un déséquilibre global dans la mise en place des tabous.

Le dysfonctionnement y est toujours individualisé (fussent sur une "personne morale" telle qu'une entreprise, mais aussi souvent avec des responsabilités individuelles internes).

Notons au passage qu'en France il y a différentiation entre justice ordinaire individualiste, et justice administrative (de la responsabilité de l'Etat, c'est à dire démocratiquement collective) : L'Etat (collectif) ne peut y être jugé que par lui même en s'auto-condamnant de ses propres transgressions des tabous qu'il a lui-même mis en place. Logique sociologiquement, où la collectivité est sencée être à la place de Dieu, ce dernier ne peut être jugé que par lui même (dé-sacralisons l'Etat).




Cas particulier de la politique : Le réformisme dans une impasse ?

 Mais donc l'humain aurait besoin dans la formalisation de ses cultes, fussent-ils laïcs, de rites acétiques, donc de traversées du désert. Ce qui pose un sérieux problème à l'idée sociale réformiste de Durkheim.

En effet, cela voudrait dire que son projet ne peut se passer d'alternance politique formant carême, et que donc le modèle rival libéral-nationaliste est appeler à défaire régulièrement ses avancées. Que son projet est appelé à faire du sur place dans l'aternance, ou rituel acétique de traversé du désert ?... Même le libéralisme fomenterait lui-même ses propres traversées du désert à travers ses crises économiques qu'il se crée tout seul comme un grand.




 Rituels négatifs ou positifs ?

Mais les rites acétiques dits "négatifs" finissent par faire rituels "positifs" : Ainsi faire carême ou Ramadan, c'est se purifier pour s'attacher la mansuétude des Dieux afin qu'ils protègent le groupe. C'est sensé amener le collectif sur le chemin de la rédemption, la régénérescence ainsi (Cf. : Rituels de la pluie). Expiatoires, on vous dit.

Les cultes modernes ne se veulent plus du tout cycliques en théorie. En pratique ils le restent, puisque les rituels y restent cycliques. Mais l'idéologie repose sur l'idée d'un seul cycle contrairement aux croyances d'origine : Il y eut un début (la genèse), et il y aura une fin apocalyptique et définitive amenant à la résurrection collective au paradis (saison des pluies toujours).

Et cette théologie place la vie et l'humanité dans l'entre deux, c'est à dire en pleine saison sèche : Nous sommes sur terre pour faire notre deuil du paradis perdu : Son retour, la saison des pluies, c'est pour après l'apocalypse !

Durkheim insistait sur l'importance de l'effervescence, voir folie, dans les rituels de régénération collective. Et cette effervescence fait un peu défaut dans les cultes modernes. Et c'est logique : Car ces cultes nagent en pleine ambivalence.

En effet leurs rituels ont pour fonction intrinsèque de revitaliser le collectif (généralement dans la joie du retour de la saison des pluies-régénérescence du totem), mais parallèlement dénient tout retour positif (Cf. la pluie) dans le monde terrestre : Le mal est sur terre, le bien est dans l'au-delà. (très Cathare tout ça). Donc il n'y a pas à fêter prématurément un retour de la pluie non prévu en soi ici et maintenant.

En quoi plus on ferait carême sur terre, plus on aurait de chance de retrouver la pluie régénératrice dans un autre monde. A ce petit jeu désopilant, le puritanisme protestant est le champion, et le pire est que ça marche : Ainsi le travail, ou dur labeur, est le signe d'une traversée du désert qui sera d'autant plus "productive" que réalisée aridement (avec le plus grand sérieux et le minimum de joie).

 Accessoirement les retombées positives de ce travail acharné sont vécus comme de simples encouragements divins : Ce ne sont tant les conséquences d'un sérieux labeur, mais un simple avant goût de ce que sera l'au-delà si on continue ainsi. On ne doit pas en attendre plus de retombées en ce bas-monde. D'où : à supposer que le travail ne porte pas de fruit : c'est normal, car nous restons fondamentalement en saison sèche... Pas de découragement en cela : On est sur terre pour expier notre faute originelle, et le travail est là pour ça. Le culte protestant reste dans cette sobre et insipide logique dans ses ritualisassions, mais les autres ne sont pas loin. Il y a même un ascétisme au second degré dedans : Normalement la foi doit apporter joie et réconfort, mais ce serait du paradis avant l'heure, à proscrire donc... Il est de bon ton de douter, c'est à dire de se priver de la béatitude jouissive d'une foi sans faille. Le désenchantement n'est pas tant une conséquence de la démystification du sacré par la science, qu'un accomplissement piaculaire ultime. Et de fait la science n'est qu'une épreuve expiatoire de plus dans le parcours aride du croyant : Sa foi est d'autant plus méritoire ainsi. *

Soyons iconoclastes jusqu'au bout : L'athéisme puritain serait même une hypertrophie de cette logique, à la limite plus de foi du tout, plus de paradis in fine. Sauf qu'évidemment que reste-t-il à l'humain comme perspective paradisiaque : Le bonheur de vivre ici et maintenant, du moins le plus vite possible, et là ça n'est plus très acétique. Heureusement quand on a pas encore bien digéré sa culture judéo-chrétienne on peut rester dans un ascétisme du style : "la vie est une absurdité sans destinée, dont joies et peines ne sont que des avatars insignifiants". La faute à expier n'existe pas soit, mais nous devons assumer le non sens de la vie en soi, dû à l'ivresse initiale du Monstre. Argh ! ça c'est de l'ascétisme, on explose le concept de détachement bouddhique.

Deuil :

Précisons le concept : Un bon nombre de rites "piaculaires" sont liés aux rituels de deuil. Le deuil est le prototype de l'affaiblissement de la communauté par amputation d'un de ses membres : Un seul être nous manque et tout s'étiole autour de nous, mais surtout cela devient le symbole de l'étiolement social. Les rituels sont ainsi de l'ordre de l'expiation. Aucune faute en soi, mais quelque part il nous faut quand même le signifier clairement. Les membres du groupe se doivent de réaffirmer que personne ne souhaitait cette disparition d'une partie de l'âme du groupe dont un de ses membres était habité : les défauts du défunt sont ainsi gommés, ou excusés, au profit de ses grandes qualités sociales. Ce qui est célébré ce sont avant tout la nécessité de souscrire à la solidarité de groupe. Un membre du groupe disparaît, mais le groupe resserre ses liens à cette occasion en célébrant cette nécessité : Les repas d'enterrement commencent généralement dans la tristesse due à la disparition de l'être cher, mais finissent dans l'alégresse de la communauté ainsi refondée par la ritualisation du deuil.

Au fond la "faute" originelle serait celle de laisser tomber le collectif, et le culte ascétique consiste essentiellement à démontrer et redémontrer que chacun est près à se sacrifier pour lui. En général il suffit de signifier "évidemment" en rajoutant aussitôt "si le besoin s'en faisait sentir". Mais bien entendu le dire est un peu facile, il faut donc le démontrer concrêtement. Mais aussi il faut bien une bonne raison à cela, et quoi de mieux qu'une bonne menace bien réelle dans le concrêt. Aussi on peut sérieusement se poser la question si la crise ou la menace n'est pas bien souvent imaginaire ou grossie, voir même fabriquée de toute pièce, afin de servir de prétexte à réaffirmer l'attachement de chacun au groupe ?

En période d'abondance (cf. saison des pluies), la solidarité de groupe n'a pas tant à être affirmée puisque par définition le totem se porte bien "tout seul" par l'effervescence de la société que chacun célèbre dans la joie : Il est alors facile de se réclamer d'un totem qui nous comble, et les rituels "positifs" ne sont pas tant une charge, et surtout sont très largement compensés par les supposées retombées positives du totem pour chacun. Mais l'angoisse collective saisit alors le collectif : Et si c'était moins prolifiquement facile serions nous toujours prêts à célébrer notre totem en nous sacrifiant pour lui. La meilleure façon de le savoir est de se confronter à la situation soit en l'imaginant, soit de façon plus convaincante en nous confrontant avec une situation réelle de traversée du désert. 

D'où la question : Les crises sont-elles si réelles que cela ? Ou ne sont-elles qu'une mise en scène artificielle inconsciente de nos angoisses collectives de délitement social ?

L'impérieuse nécessité de l'ascétisme est-elle toujours de l'ordre rationnel, ou idéologique ?

Notons ici toute l'ambiguité de certains sociologues à la solde de l'économie et des politiques. Pour eux puisque "ça marche" économiquement et politiquement, autant adouber cette idéologie telle qu'elle - plutôt que d'essayer d'en promouvoir une nouvelle, aléatoire, dont on ne connaît les effets à terme (Cf. communisme, rationalisme, etc.) -.

En fait, ils ne croient pas en la théologie de base, mais croient en sa capacité idéologique à engager une "bonne" dynamique sociale au vu des résultats : C'est une croyance au second degré, et un conservatisme idéologique.

Ainsi dans la crise économique que nous traversons, il est bon de travailler stoïquement à rétablir les équilibres "naturels" sans rien attendre en retour dans l'immédiat... voir même à terme : émergences de nouvelles puissances économiques entre temps, amenant une raréfactions des matières premières accrues, et l'accélération des cataclysmes écologiques... Une vie définitivement ascétique, quoi...

En gros les cultes modernes ne nous proposent qu'aridité et stoïcisme sur terre... Enfin pas tout à fait : On a droit à quelques menus plaisirs, mais de façon quasi hygiénique : Il faut bien entretenir le moral pour supporter l'épreuve de cette vie d'acèse.

Pour mieux repérer ce qui est de l'ordre des rites "négatifs", en fait tout ce qui est de l'ordre du sacrifice expiatoire demandé aux ouailles en fait partie : Jusqu'au sacrifice de sa vie... Heureusement qu'il y a des étrangers pour expier à notre place : externalisation de la faute oblige.

La guerre, le djahad, les sacrifices humains, souvent sur fond de racisme, ne sont en sorte que des rituels de réaffirmation que cette vie n'est qu'assèchement inintérressant en regard de la prolifique suivante.

L'humain primitif était habité par l'âme de son collectif qui refondait le lien par l'exaltation, le moderne refonde le lien sur l'abnégation expiatoire. Les politiques cherchent systématiquement à remettre du réenchantement dans leur politique en suivant les principes de Durkheim sur l'exaltation sociale consacrée, et je dirais tant mieux ; Néanmoins ils sous estiment les potentialités des cultes expiatoires en cela (quoi qu'ils arrivent aussi très bien à nous le faire valoir après élection : je vous ai fait miroiter une terre promise, mais il y a le désert à traverser avant).

Bon à ce point je me fais néo-durkheimien : Promettre la saison des pluies dans l'au-delà signifie en soi que la refondation de la communauté humaine n'est pas pour ce monde, mais pour un autre. Bon, évidemment tout ceci n'est que de l'ordre du métaphorique, les différents plans d'existences sont ceux du prôfane et du sacré bien entendu, néanmoins ça a son importance idéologique, non négligeable intrinsèquement.

La vie terrestre c'est le profane aride et désenchanté, et l' "au-delà" ne se situe pas dans un après mythique, mais bel et bien dans un "ici & maintenant" à un niveau collectif transcendé : La collectivité humaine n'a jamais été aussi dynamique qu'actuellement, quoiqu'à double tranchant. La bonne santé de l'humanité réclamerait ainsi que les humains s'angoissent pour se contraindre. Mais tout ceci fonctionne sur un mode purement sensible, intuitif evec toutes ses dérives, et pas très rationnel quand à son implantation dans le réel. On peut même parfois se demander si le réel ne fonctionne pas souvent comme une construction essentiellement imaginaire pour l'humain, au moins au niveau économique et social.

L'humanité aurait pris la place de Dieu dans sa toute puissance sur ce qui l'entoure : On n'a jamais dit qu'être tout puissant était forcément bénéfique et évident en soi quand on manque à ce point d'omniscience et de claivoyance.

 * Pour le plaisir : Prenons le costume masculin, du temps des monarques, la valeur du totem qu'ils représentaient s'illustraient dans l'exubérance vestimentaire la plus tape à l'oeil. Désormais le terne costume 3 pièces est de rigueur ; avec tout juste une cravate en fantaisie ? Que nenni la cravate est sensée représenter l'université dans laquelle on a fait son parcours initiatique par un dur labeur intellectuel tout en acèse.

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9 septembre 2012

Les Corroborris ou cérémonies

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Encore un drôle d'oiseau : donc le Corroborri est la forme initiale de la messe et de toute manifestation religieuse.

Initialement sa fonction est d'amener l'individu à un état de transe qui revitalise sa condition de membre du clan totémique en le faisant fusioner avec son totem. Durkheim pensait que l'exaltation était siné qua non à cette transmutation d'individu à membre totémique. Mais force est de constater que les chrétiens ne sont pas très expansifs durant la messe, soit on y chante des cantiques mais pas franchement du rock & roll (sauf Godspells).

N'oublions pas que les chrétiens ont du célébrer leur messes en grand secrêt durant presque 400 ans, Par ailleurs, la fusion avec l'âme du groupe et le totem peut emprunter les chemins de l'introspection et de la méditation.

Néanmoins l'exacerbation est plutôt la norme, des chants, des danses, cris et incantations amènent les participants à une sorte d'exaltation transendantale qui lui donne a penser qu'il passe du monde ordinaire à la sphère du sacré, pour ce faire on y consomme parfois des stupéfiants. Bon; exit le vin de messe pour le fidèles , mais c'est dans l'esprit... les grandes civilisations tablent plutôt sur le magistral des grands temples, mosquées et cathédrales, sur la richesse du décorum.

Ceci dit ce coté exalté se retrouve très bien dans les nouveaux cultes : La politique et ses grands rassemblements, le foot ball, basket, rave-parties et autres concerts de rock, voir aussi les carnavals et autres fêtes de la bière. Sans parler des réunions de famille ou entre entre amis, où on y parle fort en buvant l'apéro, fumant... voir même des pétards ou autres stupéfiants (ça arrive aussi).

D'ailleurs cette propention à transender la réalité en passant de l'autre coté du miroir, se retrouve dans la recherche de sensations fortes dans les fêtes foraines, mais aussi en delta plane, saut à élastique, paracutisme et autres sports extrèmes, mais aussi au cinéma où l'on se gave de sensations fortes autant qu'étranges et exotiques. Parfois aussi dans la recherche de l'exotisme dans les resto chinois, indiens, africains, et donc les voyages à l'étranger : La rencontre avec l'étrangeté de l'autre étant autant troublant, qu'a l'essence même de la trenscendance qui nous fait passer de l'état d'individu à celui de membre d'un groupe.

D'ailleurs Durkheim note que le simple fait de se grouper en nombre, pour les aborigènes habitués à vivre isolés, avait déjà en soi un effet exultatoire. En somme dans les sociétés urbaines nous vivons en corroborris permanents, d'où aussi un coté blasé, un self control plus affirmé dans les cérémonies par accoutumance.

D'ailleurs la grande fusion communautaire s'invite désormais à domicile par le truchement de la télévision, voir même d'internet : On parle ainsi de la messe du 20 heures où tout le monde s'informe de la santé de la communauté à travers les nouvelles, prenant ainsi la température de l'âme collective pour mieux la réintrojecter.

Ah oui, un des rituels prisés durant ces cérémonies, consiste à manger en commun le totem pour s'imprégner de son âme. Ceci dit, il y a de multiples autres façons de s'imprégner de l'âme du totem : exulter de joie tous enssemble lorsque son équipe marque un but (car manger sa pizza comme tout le monde devant le poste n'est que très accessoire dans le rituel) ; ceci dit ça s'apparente au canibalisme, il s'agit quand même de terraser l'aversaire pour s'emparer et se nourrir symboliquement de la force de son âme déchue.

Actuellement encore au népal, des concours de tir à l'arc sont organisés entre les différentes communautés villageoises. Les vainqueurs sont sensés avoir de meilleures récoltes dans l'année. C'est une variante des cultes de revitalisation de la nature à la saison des pluie, aussi des jeux olympiques antiques où les vainqueurs gagnaient les faveurs des Dieux. C'est très sérieux, au point qu'on dissimule des tissus imprégnés de menstrues dans les arbres sur le passage d'arrivée des adversaires pour leur porter la poisse. Le sport a donc des origines clairement sacrée. Le Népal envoie une délégation de tireur à l'arc aux Jeux Olympiques évidemment, et certains avancent que c'est pour d'autres raisons que les autres équipes... Mais est-ce bien sûr ? Quand on voit les enjeux idéologiques qu'y mettent les différentes nations, qui voient dans leur "moisson" de médailles une preuve de la vitalité de leur totem national ?

Ceci dit le sport n'a pas besoin d'antériorité sacrée pour y renvoyer. Chaque rencontre est une grande messe où chants de supporters, cris et grimages à l'image des totems mettent les communautés de supporters dans un état d'exaltation propre à ressourcer le sentiment d'appartenance à la communauté de chaque clan.

 

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9 septembre 2012

Les Chirungas : Gri-gris et identifiants

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Le totémisme moderne (suite)

Chirungas ? drôles de bestioles : Le membre d'un clan n'est pleinement heureux qu'à partir du moment où il s'entoure d'éléments qui le renvoient à son identité totémique en miroir : ils lui rapellent que sa vie est investie de sens qui le transcendent.

En général ce sont des éléments qui rapellent le totem : crucifix aux bords des chemins, chapelles, oratoires, clochers d'églises et sons de cloches, crucifix au dessus du lit et en pendentifs, évangiles sur la table de chevet, rameaux d'oliviers, chapelets, icônes.

Ces chirrungas peuvent prendre la forme de petits rituels : prière quotidienne, signe de croix à chaque mauvaise pensée, etc...

Leur effet est tellement apaisant qu'on leur prête des effets magiques : Ils sont ainsi invoqués pour conjurer le mauvais sort. Ils peuvent tourner en amulettes, ou en tics de language (mon Dieu ! , Jésus-Marie !). le neck plus ultra, c'est la relique : un Saint Graal en soi !.

Pour un fan de Michaël Jackson, écouter sa musique ne suffit pas, il lui faut des posters, une collection d'articles à lui dédiés, un teeshirt à son éffigie, alors évidemment un autographe autentique, c'est le nirvana, voir un fragment d'objet qu'il aurait touché. Idem pour un supporter de l'Olympique de Marseille.

Le cas des athées est plus ténu : A la limite l'absence de chirunga dédié à la superstition fait chirungua en lui-même (paradoxe, paradoxe !), mais aussi bien aura-il un poster de Darwwin ou Einstein dans sa chambre, ou une bibliothèque garnie d'ouvrages scientifiques et philosophiques, et très souvent il pourra prendre soin de réfléchir ses actions rationellement - mode de pensée revoyant à son identité, une sorte de prière à la rationnalité en somme - . Bref un tas d'éléments qui le conforte dans son appartenance identitaire Totémique (la raison).

L'appartenance à un clan peut se marquer vestimentairement : s'habiller punk, rasta, gothique, chic ou baba cool c'est marquer son identité "ethnique". Et en soi la mode est un laboratoire géant de Chirungas permanents.

A l'origine, chaque objet appartenant à un clan totemique (famille) était estampillé du logo totemique pour bien marquer qu'il était lui aussi habité par le totem. De même certains groupes n'hésitaient pas à se tatouer les emblèmes du totem et à marquer leur corps jusqu'à se limer les dents pour lui ressembler afin de symboliser l'incarnation du totem en eux. Tous les membres du clan portaient le même nom de famille : celui de leur totem. Ainsi quand un artisant produit un objet "il y met toute son âme", et y appose sa marque et son nom. Si l'objet a du succès, il porte chance à son producteur, il est donc investi d'un pouvoir bénéfique, supposément dû à l'âme qu'on a mis en lui. On se l'arrache donc pour bénéficier de cette puissance "magique". C'est ainsi que naissent les cultes des "marques", et de tout autre produit culturel, et ou idéologique.

Le tatouage et le percing sont des chirungas radicaux : l'individu fusionne alors avec son totem en en étant marqué dans sa chair. 

 Enfin voyons du coté des Corroborris : ...

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9 septembre 2012

Clans et identité

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 Le Totémisme moderne (suite)

La sacralisation de la personne, en tant que fusionnant avec l'âme de son totem, lui confère l'âme du groupe. L'individu n'existe qu'en tant qu'habité par l'âme collective, qu'il décline néanmoins à sa façon.

Bref, l'appartenance à un groupe d'intérêt intellectuel commun confère à l'individu son identité : la première identité est celle conférée par le groupe familial dont on hérite du nom (et de l'âme), comme dans les clans totémiques. A cette différence près que dans les cultures primitives on n'a qu'un seul clan et totem pour la vie, et l'identité de chacun se confond presque avec l'identité du groupe.

Les sociétés modernes permettent d'adhérer à une multitude de cultes ou totem. On peut-être athée, poitevin, commerçant, fan des Rolling Stones, de Belmondo, d'Einstein, des Lacoste, être socialiste, faire partie d'un club de sport et autre cercle littéraire, et de sa famille propre de surcroit. Bref avoir de multiples centres d'intérêt, mais qui sont autant de totems formant des clans distincts ; Et qui ensembles forgent une identité qui finit par être très singulière (deux coktails identiques de totems c'est très rare). En gros le croyant moderne est un peu schizophrène en matière d'identité mystiquement acquise.

Le clan des individualistes

D'ailleurs Durkheim se demandait si la religion ne tendait pas vers un mysticisme individualisé, chacun ayant un rapport de plus en plus personnel à sa foi, et non tant plus cornaquée de l'extérieur par le social.

C'est oublier un paradoxe : Un individualiste fait partie d'un groupe qui se reconnaît dans les valeurs de l'individualisme, et fait donc partie de ce groupe. Certes il ne ressemble pas à s'y méprendre à son corelégionaire (quoi que, à un certain niveau), mais ils ont en commun cette âme qui les poussent à suivre leur propre chemin. Leur totem commun reste l'individualisme : Il ne sont donc pas des modules si indépendants les uns des autres que les apparences nous laisseraient croire . En somme l'individualiste n'est qu'un membre d'une confrèrie informelle qui unit tous ses membres dans les mêmes valeurs, paradoxe mais parfaitement cohérent.

Qu'un gouvernement veuille standardiser les comportements, et on verrait les individualistes défiler ensembles pour revendiquer leur droits à ne pas faire comme leur voisin (voir même ne pas défiler concommitamment par refus commun de jouer aux moutons)

Par ailleurs le patriotisme est une religion de type clannique et totémique (le drapeau, la nation), de même que le communautarisme qui n'en est qu'un avatar... Le problème réside dans le fait où ces religions modernes se sont coupées de leurs racines totémiques. Le totémisme est entre autre un système qui organise la société entre diverses religions. Non pas comme la laïcité qui leur permet de se supporter à minima, mais comme un système global où chaque culte est nécessaire et complémentaire des autres (voir chapitre "Paranoïa religieuse"). Ce sont des religions modernes et absolutistes qui se veulent non seulement auto-suffisantes en elles-mêmes, mais surtout exclusives des autres.

Prenons la Grèce antique : Ce qui fit son développement n'est pas tant le génie propre des grecs, que la concurence exacerbée entre des cités nations, placées chacune sous la protection d'un dieu différent. Mieux la Grèce était en compétition avec ses voisins perses auxquels elle fit maints emprunts techniques, politico-philosophiques, théologique... au point même que la grèce n'eut carrément sans doute pas existé sans la Perse (certains avancent même que si Alexandre le Grand a incendié Persépolis, c'était qu'il y avait découvert que la culture Perse était à l'origine de la culture grecque et aurait voulu en effacer la trace - En fait les deux cultures étaient inter dépendantes -)

Ainsi l'Europe a bien souvent failli sombrer dans l'exacerbation de ses patriotismes absolutistes et exclusifs avant qu'elle ne les assume comme complémentaires dans l'Union Européenne (quoi que l'Allemagne imposerait bien son modèle encore de temps à autre).

L'autre, le différent, l'étranger est ainsi aussi indispensable, voir plus, à la constitution de notre identité que nos propres valeurs en ce sens que nous formons avec lui une communauté d'ordre supérieure à la notre : l'Humanité (quand même !).

Prenons une autre religion : le Sport. C'est l'affrontement de plusieurs nationalismes : Paris contre Marseille ; Madrid (castillane) contre Barcelonne (catalane) ; voir carrément les états dans les compétitions internationales. Mais aucun match ne pourrait avoir lieu s'il n'y avait qu'une seule équipe, un seul concurrent, ou si une équipe excluait toutes les autres de la compétition : La valeur d'une équipe ne vaut que dans la confrontation où l'autre est indispensable. Bien sûr que l'O.M. est le meilleur, encore faut-il le vérifier concrêtement. L'absolutisme n'y a pas sa place, sauf comme prétexte impérieux à la rencontre avec l'autre.

Et c'est facteur de progrès identitaire en soi : A confronter le résultat de nos choix tactiques et d'entrainement, on finit par les ajuster, en prenant souvent exemple sur nos adversaires, pour nous parfaire - où notre identité est généralement le résultat d'emprunts successifs à l'identité des autres. Notre excellence est en sorte fonction de celle des autres et a besoin d'elles.

Alors évidemment avoir une identité spécifique, c'est se démarquer de l'autre. On ne peut renier qu'une identité n'est qu'une variable par rapport à d'autres prises comme références. L'unicité identitaire est ainsi fonction de la multiplicité des identités : Si deux identités se ressembaient au point de pouvoir se fondre l'une dans l'autre, cela annihilerait la singularité identitaire, aussi si l'altérité n'existait pas il faudrait l'inventer.

Pour revenir à l'individualisme : L'individualisme n'est pas l'éclatement social en une miriade de particules indépendantes, c'est au contraire la divesification ou déclinaison d'un même principe qui va chercher des solutions originales dans de multiples directions... avant de faire remonter au noyau central le résultat de leurs différentes investigations.

Durkheim peut donc dormir tranquille : l'individualisme religieux n'est qu'un collectivisme religieux d'un genre particulier tout simplement.




 

Terre et identité

Dans certaines tribus, l'appartenance à un clan était dévolue à l'enfant en fonction du lieu où la mère avait découvert sa grossesse (insémination mythique). Au delà de l'anecdote, cela marque l'importance des lieux d'origine dans la genèse d'une identité : Sauf exceptions on restera français, ch'ti et lensois toute sa vie, même si on émigre à Toulouse et devient fan du "Stade Toulousain", ou en Nouvelle Zélande et des "All Black".

Il pourra surajouter autant de bribes identitaire marseillaises ou autres à son noyau au point de le rendre méconnaissable, mais il restera ch'ti dans l'âme au fond. 




 

Clans Totems et identités

Ce qui donne une identité c'est avant tout  le(s) clan(s) dans lequels on se reconnait et qui nous reconaissent. C'est à dire les totems auxquels on souscrit.

Mais attention un totem peut en cacher un autre.

Prenons le racisme ? A priori un raciste de base se dira avant tout français, voir de culture chrétienne ou occidentale, et n'admettra pas que certaines personnes ne possédant ou ne se réclamant pas de ces attributs viennent marcher sur ses plates bandes.

Et tout à coup, un certain nombre de français souchards peuvent se fédérer autour de l'idée de défendre ce qu'ils imaginent de leur identité "française". On notera d'abord que ceci est une illusion en soi, car chacun a sa propre conception de l' "âme française". Mais admettons un vague consensus mou.

En face nous aurons des communautés qui, à force de se voir ostracisées par ces "bons français", revendiquerons leurs cultures. Nonobstant on peut être juif ou noir, arabe ou "du voyage", et se sentir parfaitement français dans l'esprit républicain. Mais le racisme a tendance à engendrer le racisme, et à cristaliser les communautés en communautarismes.

Au final, une défiance raciste réciproque s'installera. On définira le racisme comme une défiance de la différence à minima, allant jusqu'à la haine de cette différence.

Ainsi quand des individus s'empêtrent dans le racisme réciproque, ils croient le faire au nom de leur identité, c'est à dire de leurs totems religieux ou culturels, mais ce faisant elles souscrivent avant tout à la détestation de la différence qui fait ainsi Totem pour eux.

Leur Totem n'est plus le drapeau français, le Coran, leur culture, le Totem principal devient "la Haine de la Différence".

Notons que la République Française éccarte le racisme à priori dans sa déclaration des droits de l'homme, donc se réclamer d'elle pour faire du racisme est d'emblée rédhibitoire , idem aussi pour le Coran qui prône maintes fois la bienveillance et la miséricorde (énormément plus que la riposte uniquement réservée à la légitime défense).

Donc le raciste quitte son clan d'origine pour adhérer au clan de la haine, où l'origine identitaire n'est plus qu'un prétexte mal ficelé pour mieux le trahir.

Donc bien qu'is s'en réclament, ces racistes trahissent leur clan d'origine en adhèrant au même clan que leurs adversaires, celui de la haine où "Qui est contre est tout contre".

Vu d'amérique la guerre 14-18 devait être absolument incompréhensible : Pourquoi tant de haines patriotiques où des adversaires héréditaires (français anglais) combattaient ensemble des alliés d'hier (prussiens et autrichiens pour les anglais) ?

Et de fait les patriotes russes, prussiens, autrichiens, anglais, français et autres ont oeuvré contre leurs intérêts patriotiques au profit des américains qui ont assis leur suprématie mondiale dans cette immense gabegie économique et démographique européenne.

Le seul Totem qui y ait gagné est celui de la Haine, car les nations totémiques se sont toutes retrouvées à genoux dans l'affaire (sauf Us).




 

Langues et identités claniques

Au début, appartenir à un totem sacré c'était porter son nom clanique, c'est à dire de famille, en même tant qu'être habité par l'âme du totem (on dit encore je suis chrétien). Non seulement tout le monde portait le même nom de famille, du totem, mais tout objet appartenant au clan totémique était marqué à l'emblème du totem, car habité par lui : le signe écrit et le nom donné sont donc indiscociables de l'âme collective. Aussi la langue est-elle devenue un marqueur identitaire au fil du temps. La langue ne sert pas tant à décrire les choses qu'à leur donner une âme, un sens sacré... dire les choses c'est leur donner du sacré : Ainsi si la science est investie d'un pouvoir "magique", on parlera d'elle avec respect. Les mots n'ont tant d'importance que dans leurs connotations "affectivisées", c'est à dire marquant ce qui est important, ou pas pour chacun, ou chaque groupe.

 Ce n'est tant d'ailleurs qu'un francophone investissent les choses autrement qu'un anglophone dans le language : il y a sans doute plus de similitudes identitaires entre francophones et anglophones africains qu'entre francophones métropolitains et africains. Ce n'est tant une question idéologique que de marquage totémique, donnant d'autres mots aux choses, elles sont sensées être habitée par une âme différente, donc un investissement sacré différent. Ceci est parfaitement illusoire, mais touche à la nature même de la genèse sacrale du language, et a donc un impact psychique et idéologique identitaire très puissant.

 

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9 septembre 2012

Profane et Sacré

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Totémisme moderne (suite)

Pour Durkheim ce qui définit ce qui est religieux de ce qui ne l'est pas, c'est la différence entre sacré (choses investies d'un certain respect) et profane (choses ordinaires et banales).

Alors dans nos sociétés séculières et laïques on aurait tendance à penser que tout est quasiment profane.

Non Tant ! Non tant ...

Il y a toujours des choses investies de respect avec tabous et obligations afférents, qui définissent ainsi ce qui est sacré à nos yeux.

  • De fait déjà, les obligations légales et sociales définissent un domaine sacré : La collectivité nationale (la Nation, la Patrie, voir simplement la Démocratie). Même si on n'est pas patriote de chez patriote, on est français plus ou moins dans l'âme, voir même Ch'ti, breton ou auvergnat, toulousain, nancéain ou marseillais. Et on souscrit par ailleurs volontiers aux rituels scolaires de nos gamins, qui perpétuent la continuité de la société dans leur initiation aux rites et savoirs indispensables à s'insérer dans la communauté.
  • Travailler, même à la maison, est aussi un rituel d'appartenance à la société : Il "faut" se montrer utile à cette dernière. L'entreprise elle même codifie entièrement ses rapports sociaux, c'est une religion en soi pleine de tabous et obligations quasi sacrés.
  • Les règles de politesse formalisent aussi des clans délimités par des signes de déférences quasi religieux, On ne tutoie que la famille, ses amis, voir les membres de certains clubs ou organisations auxquels on souscrit, tout ceci définissant les clans auxquels on appartient. Et le clan est la base de tout investissement sacral. La solidarité de clan va de soi, et chacun se protège mutuellement des agressions extérieures.
  • Maintenant vous êtes peut-être fan d'une idole de la chanson (même pas trop connue), d'un monstre sacré du grand écran, Einstein, Henderson, voir vous êtes officionado d'une marque vestimentaire, parfum, ou de moto : Pas question de les vilipender devant vous sans réagir, c'est un devoir quasi sacré envers le totem. La bagnole c'est sacré... etc...
  • Vous même en tant que membre de la communauté avait droit à maints égards : Il nous faut prendre soin de nous, hygiène de vie, rasage, maquillage, et tout ce qui se rapporte à vous de même car "vous le valez bien". Si le totem est sacré, chacun de ses affiliés et sous représentations en font partie intégrante, et toucher à l'un d'eux c'est toucher au totem...
  • A supposer même que vous soyez anticonformiste, il vous faut alors souscrire aux rituels ostansibles de cet anticonformisme : c'est votre catégorie, votre définition sacré.

Bref tabous et obligations en tous genres délimitent le sacré pour chacun et son système totémique.

 

Mais, me direz vous, tout n'est pas sacré pareil pour tout le monde.

L'un est fan de l'Olympique de Marseille et des Beatles, l'autre de Michaël Jackson et de l'U.M.P. : Eh bien oui ! Nous n'avons pas les mêmes valeurs, et on peut avoir des religions différentes, ce qui est sacré pour l'un ne l'est pas forcément pour l'autre. C'est même la base du système tribal à l'origine, chacun fait partie d'un clan qui vénère son propre totem, qui indifère pourtant son voisin. Mieux cette cohabitation est nécessaire, dans la mesure où on ne devait pas se marier au sein d'un même clan à l'origine, et chacun des époux y gardait sa religion totémique d'origine : Apprentissage de la tolérance mutuelle obligatoire donc. Bref, une société polycultuelle et laïque (mixité et tolérante entre les différents clans) est des plus saines.

 Comment savoir ce qui est sacré  en soit ?

 C'est tout ce qui a une valeur démesuré : Un soldat va chercher un bout de tissu sous la mitraille, ne croyez pas qu'il a eu une envie pressante de se moucher, c'est juste un bout du drapeau national qu'il ne veut pas laisser tomber aux mains de l'ennemi : il ne risquerait jamais sa vie pour un simple bout de tissu, mais pour le drapeau sacré si !

 Idem, des fans d'un chanteur se battent pour un bout de tissu, dont ils arrachent chacun un bout, toujours pas de rhume des foins, le chanteur vient juste de jeter son écharpe dans le public.

 Des milliers de pèlerins viennent en pèlerinage voir un morceau d'étoffe, gardé religieusement à grand frais : C'est un saint qui avait le rhume des foins et s'est mouché dedans.

 Ne faites jamais une mauvaise plaisanterie sur la Harley d'un Hell's Angel si vous tenez à votre peau : l'objet est sacré...

 L'argent est un bon indicateur aussi : Si quelqu'un veut vous acheter un millier d'euro un gribouillis sur un papier tout chiffonné, ce n'est pas parce qu'il a perdu la tête, mais que c'est un autographe d'une célébrité totemisée. Aussi tout est plus ou moins sacré, parce ce que possédé par quelqu'un, donc investi d'une âme par lui, et chaque chose, chaque parole a une valeur différente pour l'un ou l'autre suivant qu'elle soit vécue comme sacrée ou profane par l'un ou l'autre... Et c'est plus ou moins, il y a des sous-totems qui ne sont que très vaguement sacrés, dont la valeur ne vaut même pas qu'on se baisse pour les ramasser?

Mais voyons voir de plus près ce qu'est un clan sacré : ...

 

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9 septembre 2012

Brouillon

7 septembre 2012

Le Totémisme moderne courant

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  1. Le totémisme moderne courant
  2. Profane et sacré
  3. Clans et identité
  4. Les chirungas : gri-gris et identifians
  5. Les corroborris ou comémoratons
  6. Les rites piaculaires (acétisme)
  7. Mythologies et idéologies

La démonstration de Durkheim consiste essentiellement à définir le sacré (la religion) comme le ferment sine qua non de toute communauté humaine.

Toute communauté humaine se fonderait ainsi sur l'établissement de Totem et sous totems sacrés vénérés, dont la fonction essentielle est de former et entretenir le lien social qui unit la communauté.

Mais Durkheim, obnubilé par cette démonstration, a eu du mal à tirer toutes les conclusions de son étude en cantonant le sacré aux phénomènes religieux en eux mêmes.

De fait, son projet ne pouvait que déranger la pensée religieuse stricto sensu, voir même les rationalistes, et il n'a sans doute pas voulu pousser le bouchon trop loin dans sa démonstration déjà assez iconoclaste par elle même.

Par ailleurs, les modèles sociaux de son époque étaient assez stéréotypés, et finalement assez réducteurs en soi. Et s'il a ouvert une brèche dans ces stéréotypes, il n'a pas ouvert les vannes à fond sur les bouleversements que son étude pouvait révolutionner dans notre façon de concevoir le sacré, notamment dans ses aspects d'apparences laïques qu'il assimila assez prudemment au profane par manque d'audace.

Aussi il n'a pas connu les bouleversements idéologiques apparus après à son étude, tel que le développement des cultes sportifs, politiques et culturels, assez embrionaires à l'époque : J.O., foot, basket, base ball, etc, communisme, nazisme, et les grandes messes politiques à l'américaine et autres actuelles, enfin le développement des cultes des idoles du show biz, et des arts en général.

Néanmoins, il a entrouvert la porte. Mais on pressent bien que sa proposition : "Il n'existe pas de communauté humaine qui ne repose sur la sacralistion de Totems sacrés identifiant cette communauté", que cette proposition ne peut-être que réflective en soi. C'est à dire "Toute communauté  possède donc à priori des totems qui la fondent et perpétuent". La question est donc de mettre en lumière les totems en question, l'âme collective qu'ils fondent et formalisent, ses valeurs, croyances et rituels qui y sont attachés ?

Même s'il n'a pas enfoncé le clou sur les communautés fondées sur des valeurs sacrées mais à priori laïques, il n'a cessé d'émailler son étude d'exemples modernes de totémisme emprunté à la société laïque.

  • Sur la famille, il fait ainsi remarquer que les armoiries des familles nobles, ressemblent à s'y méprendre  aux chirrunguas amérindiens (emblèmes totémiques) qui identifient un clan religieux (ancètre de la famille actuelle), démontrant sans en avoir l'air la nature profondément religieuse de la structure familiale. Nonobstan une religion n'est jamais qu'une famille idéologique où on s'y appelle frères, saint-père, mère supérieure, etc..
  • Sur la politique, il démontra que la révolution française (plutôt antichéricale pourtant) se fonda sur des processus émminemment sacrés. Il enfonça le clou en distillant des exemples de totems sacrés attachés au patriotisme tels que la sacralisation du drapeau national, qui en soi avait une valeur plus importante que le simple morceau d'étoffe qui en était le support, profane à priori, mais qui s'exacerbe dans sa sacralisation.
  • De même sur les manifestations culturelles, il fait remarquer que ces dernières étaient entièrement dévolues aux cultes à l'origine : Des chants, corégraphies, histoires étaient ainsi mis en scène lors des corroborris (manifestations religieuses), rituels de renouvellement et refondation spirituels du lien social.
  • Il y développa la notion de "mana" : Avoir de la "mana" c'est posséder une force spirituelle, que l'on pourrait traduire par charisme, étendu donc aux domaines politiques, artistiques et de culturels. Einstein, Yannick Noah, Jaurès avaient de la "mana". Ceci dit le charisme est une valeur relative, si Sarkosy a du charisme (diversement apprécié d'ailleurs), Fillon n'est pas à priori charismatique (et a sans doute été choisi  en cela pour ne pas faire d'ombre à Sarkosy), mais son intronisation comme premier ministre lui a conféré du charisme : Occuper un poste sacralisé confère "naturellement" du charisme à son occupant.
  • Enfin il met l'accent sur le caractère sacré de toute conception cosmologique humaine de l'univers, c'est à dire de la somme de connaissances qu'un groupe se forge dans la connaissance de son environnement. Aussi assimile-t-il la démarche scientifique à une phénomènologie quasi religieuse, quoi que rompant avec la mythologie en se fondant sur la rigueur méthodologique, elle reste néanmoins attachée au principe que les évidences premières sont trompeuses et que la réalité des phénomènes en cause reste à découvrir au dela de ces apparences : qu'il y a bien un sens caché qui reste à découvrir par des rituels initiatiques.

Et si Durkhein n'a pas approfondit la question, tout occupé par sa démonstration initiale, il a clairement entrovert la porte à toutes les études ultérieures sur les développements laïcisants de ses succésseurs sur les fondements des sociétés modernes actuelles.

 

 Ainsi maints sociologues et philosophes suivront et approfondiront ces pistes : Par exemples : 

  • D'une manière générale on signalera l'ouvrage collectif " Le Sacré hors religion ", Ou encore l'ouvrage " Nos cultes modernes " de Philippe Laburthe-Tolra (Ed. PUF 1992)
  • Sur le politique Raymond Aron initia en 1940 : "Je propose d"appeler religions séculières les doctrines qui prennent dans les âmes de nos contemporains la place de la foi évanouie, et situe ici bas le salut de l'humanité, dans le lointain de l'avenir, sous la forme d'un ordre social à créer" (1) : Ce que Pierre Bourdieu qualifira par ailleurs d' "Idolâtrie politique" (2), Jean Séguy de "religions analogiques" (3), Julien Freund de "politiques de salut" (4), et Jean Pierre Sironneau de "religions politiques" (5). et un commentaire d' Henri Desroches sur le livre d'Alain Peyreffite sur la Chine Maoiste. . .  Certains partent plutôt d'un postulat weberien dans le concept du "politique investi du reflux du sacré des religions désenchantées", mais finalement ces derniers finissent par renvoyer à Durkheim.
  • Pour le sport on notera Pierre Sansot dans son ouvrage "les sports et le sensible" (6), Et l'essai de Denis Muller "Le football comme religion populaire et comme culture mondialisée"
  • Concernant les arts on verra au passage cet article de Renault Tarlet "Le rituel du concert et la quetion du sacré" (2009)

Bon, on n'en finirait pas de s'étaler sur la pléthore d'essais sur la question...  Mais plutôt que parcourir les domaines visés exhaustivement, tachons de définir les caractéristiques générale des courants sociaux touchant au sacré ? A quoi peuvent s'appliquer ces lois fondamentales universelles... Eh bien, suivant la définition de Durkheim, "toute communauté humaine s'étant formée, autour de n'importe quoi qui définisse un intérêt commun", en général ce n'importe quoi revet un respect suffisant dans cette communauté pour qu'elle sacralise tout ce qui s'y rapporte, formant ainsi Totem. Ceci dit un Totem n'est pas toujours évident au premier abord : Quel est le totem des athées ? la raison ?... ou la foi en la capacité des humains à se passer de dieux ?... c'est assez impalpable en soi.

Mais donc OUI ! Durkheim a bien ouvert la porte à une lecture totémique et sacrale de toute communauté d'esprit fut-elle parfaitement laïque.

1. Raymond Aron : "L'age des empires et avenir de la France" (Ed. Défence de la France - 1947)

2. Pierre Bourdieu : " La délégation et le fétichisme politique " (1984)

3.  Jean Séguy : " Modernité religieuse, religion méthaphorique et rationalité " (1989)

4.  J. Monnerot :"Sociologie du communisme" (éd. Hallier)

5. Jean Pierre Sironneau  "Sécularisation et religions politiques" (Ed. Mouton - 1982), "Escatologie et décadence dans les religions politiques" 

6. Yves Le Pogam : " L'anthropo-sociologie poétique de Pierre Sansot " voir chapitres "Sacré, émotion et production symbolique", "L'entrée dans le sacré"

 

Mais voyons voir les points de vues visibles qu'on peut observer de visue sur la question au quotidien : ...


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Formes élémentaires de la vie religieuse - Emile Durkheim
  • Résumé du pavé de Durkheim sur la religion. mais aussi digressions sur l'actualité de son analyse, et sur les extrapolations et rapprochements avec d'autres courants de pensée (sociologiques, psychologiques, etc...)
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